One forest summit à Libreville: le nouveau paradigme proposé, lutter contre la déforestation et financer ceux qui ne déforestent pas

Ph. ACTAULITE.CD

ACTUALITE.CD et DESKNATURE.COM s’installent à Libreville (Gabon) du 1er au 2 mars 2023 pour vous faire vivre le One Forest Summit. Ce sommet est consacré aux enjeux forestiers et se concentre sur les défis communs rencontrés par les trois grands bassins forestiers de la planète : la forêt Amazonienne, le bassin du Congo et les forêts d’Asie du Sud-est, représentant 80% des forêts tropicales du monde et deux tiers de la biodiversité terrestre. Interviews, vidéos, témoignages à suivre exclusivement sur nos plateformes. 

Christophe Béchu, Ministre français de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, est notre invité.

Quel enjeu pour ce sommet ?

L'enjeu de ce sommet, c'est que ça fait des années qu'on explique qu'il y a le dérèglement climatique et la biodiversité, et là on a un sommet qui prétend s'attaquer aux deux en même temps. Parce que tout est lié et parce que le dérèglement climatique menace nos forêts, en menaçant nos forêts, il détruit une partie des habitats de la biodiversité et il limite la séquestration de carbone si on veut inverser ça, faut faire exactement l'inverse.Il faut qu'on aide les lieux qui séquestrent le plus de carbone dans la planète à être préservés. Et dans cela, il y a quelques endroits magiques sur cette planète que sont les forêts primaires tropicales : l'Amazonie, les forêts du bassin du Congo et l'Asie du Sud-Est. À elles seules, elles concentrent 75 % de ce que les scientifiques appellent le carbone irrécupérable. Autrement dit, si demain on les déforeste, ce serait une bombe climatique qui rendrait totalement impossibles tous les accords qui ont pu être pris et dont on sait qu'ils sont déjà parfois pas en passe d'être tenus. L'idée, c'est de dire qu'aujourd'hui jusqu'à maintenant, celui qui déforeste, bon an mal an, tire un avantage économique parce qu'on a beau pleurer, regardez ce qui se passe à la fin, ces produits arrivent chez nous. Comment est-ce qu'on inverse ça ?  D'abord en luttant contre la déforestation et ensuite en finançant ceux qui ne déforestent pas. Le premier acte, il a été posé par le Parlement européen à la fin de l'année dernière et il va faire l'objet d'un vote dans quelques jours. Le deuxième, il commence avec ce One Forest Summit où on va poser la question de comment on rémunère le fait de ne pas toucher à sa forêt primaire?

Le président Macron va prendre le leadership ?

Le Président est celui qui en Égypte a lancé avec le président Bongo l'idée de dire qu’on va faire ce One Forest Summit. On est dans la continuité de l'engagement qui ont pu être pris par le passé. Mais à la fin de la journée, ce qui compte c'est pas qui a pris le leadership, c'est est-ce que le monde est capable de se remettre dans une trajectoire qui est compatible avec un avenir pour les écosystèmes et pour notre espèce.

Très concrètement, comment on rémunère?

D'abord, on donne un avantage économique à ce qui est produit dans un pays qui ne déforeste pas et donc très concrètement, on a un temps sur l'exploitation et la gestion durable des forêts qui va nous servir à regarder comment on rémunère des gens qui produisent du bois ou qui produisent des produits agricoles sans toucher à leur capital forestier. Quelle valeur supplémentaire on peut lui donner.  L'autre partie, c'est ce qu'on appelle les partenariats de conservation positive. C'est cet acronyme qui est au cœur des négociations que nous allons avoir et qui consiste à financer au travers des dispositifs de solidarité. Ce que c'est demain le Fonds vert pour le climat est ce que c'est le Fonds pour l'environnement? Le fait de ne pas toucher à son écosystème comme si, finalement, on rémunérait le gardiennage de cette forêt primaire. À quel montant? De quelle manière, avec quel calendrier? Ça va être au cœur de pour le coup du 3ème groupe de travail qui commence ce matin et de tous les entretiens, y compris bilatéraux jusqu'à demain après-midi.

Refuser de dédier un fonds spécifique à la biodiversité. N’est-ce pas antinomique à ce que vous déclarez ?

Absolument pas. Il y a bien un fond spécifique pour la biodiversité qui a été décidé à Montréal. La seule chose, c'est qu'on l'a dit, on va pas créer une nouvelle institution pour gérer ce fonds, ce fonds biodiversité, on va le faire héberger par le Fonds mondial pour l'environnement parce qu'à chaque fois que vous créez une institution, vous achetez des locaux, vous rémunérez des équipes, vous mettez un an ou deux  pour vous mettre d'accord sur la gouvernance et les statuts, et à la fin. Les pays qui ont besoin d'argent ne voient pas la couleur. Déjà qu'on a des dispositifs de financement internationaux avec des tuyaux qui sont parfois tellement longs qu'entre le moment où on met les crédits et le moment où ils arrivent sur le terrain, ça génère de l'insatisfaction. Créer un nouveau fonds n'aurait pas été une bonne idée. En revanche, on a maintenant un rendez-vous, c'est de vérifier l'efficacité de ce dispositif et ça, dès aujourd'hui, on aura des échanges avec le Fonds mondial pour l'environnement.

Du 1er au 2 Mars 2023, il sera question d’intensifier la coopération internationale pour la protection et la gestion durable des forêts tropicales autour de trois thématiques : la recherche scientifique sur les écosystèmes forestiers, les chaînes de valeurs durables dans le secteur forestier, et les financements innovants de la biodiversité. Le One Forest Summit réunit des chefs d'État et des ministres de tous les continents, notamment des experts et des représentants d’ONGs autour de plusieurs objectifs. Il s’agit de donner aux pays forestiers des solutions très concrètes pour leur permettre de tirer des bénéfices économiques des politiques plus protectrices des forêts ou encore de rémunérer les pays qui réduisent la déforestation, et lancer des mécanismes innovants pour financer des zones protégées.