RDC-Affaire 398,9 millions $ des forages d’eau: quelle piste suivre pour établir les responsabilités ?

Forage de point d'eau à Butembo
Forage de point d'eau à Butembo

Le contrat de l'installation de 1000 forages et de construction de stations mobiles de traitement d'eau dans 1000 localités à travers la RDC fait débat. Le gouvernement congolais, représenté par le ministère du développement rural et le consortium STEVERS Construct-sotrod Water, sont tombés d’accord en avril 2021. Le projet a été évalué à 398.982.383,41 dollars américains. 

Deux ans après, le rapport conjoint de l'Observatoire de la Dépense Publique (ODEP) et la Ligue Congolaise de Lutte contre la Corruption (LICOCO), publié le 12 avril 2024, sonne l’alerte d’un possible détournement de fonds et dénonce la surfacturation du marché public. Ces deux structures de la société civile proposent la mise en place d'un comité de suivi de ce projet.

Dans un document du 11 avril dernier, le ministre des finances dit avoir obtenu la révision à la baisse du prix unitaire d'un forage, qu'il estimait très élevé. “ C'est ainsi que  ledit consortium avait décidé d'augmenter le nombre de stations à livrer à l'État congolais, de 1000 à 1340 pour un coût unitaire de 297.748 dollars américains”, a-t-il souligné.

“ D'après les informations dont nous avons possession au niveau de Bureau de formation pour le développement intégrale (Bufordi), ce marché a été passé par la procédure de gré à gré. On avait donné un marché à un entrepreneur, qui n'a pas pu bien réaliser le projet, on peut le dessaisir du marché, on le donne à quelqu'un d'autre. Toutefois, le marché avait reçu l'autorisation spéciale de la Direction générale de contrôle des marchés publics. Et puis le contrat a été signé en bonne et due forme entre les deux parties. Par rapport aux informations que j'ai, je peux admettre que la procédure a été respectée ”, a déclaré Joé Mutombo, chargé de programme à Bufordi.

Où se trouvent ces stations de forage d'eau ?

Le dossier est désormais entre les mains de la Justice qui tente de localiser les forages d'eau livrés au Gouvernement. Dans un réquisitoire publié le 18 avril dernier, le procureur général près la cour de cassation Firmin Mvonde a chargé le Directeur général du Bureau Technique de Contrôle(BTC)  de se rendre au siège de STEVERS pour obtenir des informations sur l’exécution dudit projet. “Il y a urgence”, écrivait-il..

Si la procédure de passation dudit marché public suscite des doutes, son paiement a été effectué en procédure d’urgence. De quoi irriter le Centre de recherche en finances publiques et développement local (CREFDL). 

“Le paiement n'a pas respecté le manuel de procédure et du circuit de la dépense publique. Et le ministre des finances a actionné, en violation de la loi, la procédure d'urgence pour payer ce fonds. Si ces dépenses avaient suivi le circuit normal, les contrôleurs budgétaires allaient vérifier en amont l’exactitude des coûts proposés par les fournisseurs, et aussi le prix qui est d'habitude applicable sur le marché”, a déclaré Valéry Madianga, coordinateur national du CREFDL. 

Et de poursuivre :

“Le ministre des finances dispose de 48 heures avec ses services pour vérifier les pièces comptables annexées à la demande des fonds. Le ministre du budget et celui des finances ont une lourde responsabilité dans le système de gouvernance financière en RDC”.

Alors que les yeux des congolais sont tournés vers la justice pour établir les responsabilité, Samedi 20 avril dernier, le consortium STEVERS Construct-sotrod Water a signé un accord avec l'Inspection générale des finances pour la livraison, au mois de juillet prochain, de 239 stations de forage, tout en qualifiant « d'infondées» les accusations de surfacturation du projet.

Samyr LUKOMBO