Slam - “A ses yeux” : Jimmy Kande dénonce la sélectivité de l’indignation entre les tueries en RDC et ailleurs dans le monde

Déplacés de Kanyaruchinya, à proximité de Goma. Photo/ACTUALITE.CD
Déplacés de Kanyaruchinya, à proximité de Goma. Photo/ACTUALITE.CD

S’il est des congolais qui lèvent leurs voix depuis des années pour demander de faire une halte au cycle de violence en RDC, Jimmy Kande en fait partie. Directeur de la Plateforme de Protection des Lanceurs d'Alerte en Afrique, il s’illustre aussi dans le monde artistique avec le même message que dans une marche ou devant la presse. Son Slam dénommé “A ses yeux” en est un exemple.

Ce morceau est un cri de cœur, un éveil de conscience, une dénonciation de ce que l’humanité sait mais continue d’admettre au nom des intérêts de loin moins importants que des millions de vies humaines copieusement sacrifiées depuis près de 30 ans, sous une impunité qui ne dit pas son nom. “A ses yeux” est aussi un questionnement sur ce que vaut la vie d’un congolais aux yeux de ceux qui peuvent faire bouger les lignes dans le sens de l’arrêt des hostilités.

« Ce texte vise à sensibiliser les peuples du monde à la situation au Congo, qui semble être ignorée par ceux qui pourraient réellement contribuer à trouver une solution. Le pire dans tout cela n'est-il pas "le silence des autres qui font semblant d'hésiter, d'aider", comme l'a dit Maître Gims dans l'une de ses chansons ? », s’interroge Jimmy Kande.

En comparaison, l’artiste évoque les cas des peuples ukrainiens et palestiniens pour lesquels le monde, la communauté internationale se montre particulièrement préoccupée en vue de trouver des solutions, même s’il s’agissait de livrer des armes. Face à cette sélectivité de l’indignation, que doit être l’attitude des congolais et des autorités congolaises ?

« Si des rapports crédibles confirment l'implication du Rwanda, pourquoi la communauté internationale n'agit-elle pas de la même manière qu'avec la Russie ? Face à cette indignation sélective qui entraîne de lourdes pertes en vies humaines, il est du devoir de chaque Congolais, puis des Africains conscients et des amis de l'Afrique, de s'impliquer pour dénoncer cette inégalité qui laisse de nombreux enfants orphelins. Cette dénonciation ne doit pas pour autant occulter la responsabilité de nos dirigeants à trouver des solutions pour défendre nos frontières », ajoute Jimmy Kande.

Silence coupable 

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La partie Est de la RDC est en proie à des massacres, décès viols des femmes, enrôlement des enfants mineurs dans l’armée, et cela quotidiennement. Si le monde le sait déjà depuis toutes ces années, garder silence reste une forme de culpabilité que Jimmy Kande n’approuve pas. Il ne tarit pas de moyens pour dire haut et fort ce qui se passe et qui doit s’arrêter coûte que coûte. “L’indifférence du monde soulève des questions sur la sélectivité de l'indignation”, estime-t-il.

Il pense également que chaque congolais où qu’il se trouve, a le devoir d’agir pour recréer la solidarité humaine que le monde ne cesse de détruire chaque jour.

« Mon slam a donc pour objectif d'interpeller les peuples du monde en leur rappelant que nous sommes tous acteurs et que notre silence est coupable, et surtout d'appeler les États du monde et le Conseil de sécurité à agir en plaçant la vie humaine au centre de leurs préoccupations », souligne-t-il à ACTUALITÉ.CD

Et d’ajouter : 

« À ce stade et à court terme, je pense qu'il est nécessaire d'impliquer tous les acteurs pouvant jouer un rôle dans cette crise, tous les pays capables de faire pression sur le Rwanda pour qu'il cesse son soutien au M23. Nous constatons que le Rwanda promeut son image embellie dans plusieurs capitales occidentales, alors même que cela se fait parfois au prix du sang des Congolais » 

Le problème est bien connu. Nul ombre ne se fait actuellement sur le soutien du Rwanda au M23, principal groupe armé qui sème la désolation à l’Est de la RDC. Aux Nations Unies, à l’Union africaine et ailleurs, les autorités congolaises le disent au monde depuis quelques années. Des rapports si évidents le démontrent noir sur blanc. Mais le Rwanda n'est pas isolé ni sanctionné comme c'est le cas avec la Russie, aussi considérée comme agresseuse.

La solution, aussi efficace qu’autoritaire, recommande Jimmy Kande, est d’avoir une armée respectée qui dissuaderait les pays voisins afin d'espérer vivre en paix un jour.

« Nos richesses attirent les convoitises et le seul moyen de nous protéger réellement dans ce monde qui perd de plus en plus son humanité est de disposer d'une véritable armée, ainsi l'éléphant ne sera plus dérangé dans son sommeil par le moustique qui l'empêche de dormir depuis tant d'années », conclu-t-il.

Kuzamba Mbuangu